Des massacres ont été perpétrés, le 17 octobre 1961 à Paris, à l’encontre des Algériens pacifiques qui sont sortis dans les rues de Paris pour réclamer l’indépendance de leur pays, l’Algérie. Le 5 octobre 1961, un couvre-feu a été arrêté par le préfet de Police de Paris, Maurice Papon, pour tous les « Français musulmans d’Algérie ». Cette manifestation a été organisée par le Front de libération nationale (FLN) et a été cruellement réprimée ; des centaines d’Algériens furent jetés dans la Seine.
La société civile française s’organise pour donner à ce 51ème anniversaire du massacre du 17 octobre 1961 un caractère particulier. Un collectif d’associations de droits de l’homme s’est mobilisé pour interpeller et demander au Président de la République française et son gouvernement la reconnaissance de ce crime d’Etat mais aussi pour s’exprimer sur ces sombres événements de l’histoire de France. Dans une telle situation, le devoir de mémoire s’impose de lui-même.
Il faut rappeler que la classe politique française est ébullition depuis quelques années sur les questions mémorielles. La France et l’Algérie pourraient travailler ensemble pour cicatriser les blessures de l’histoire commune et instaurer la sérénité dans les relations entre les deux pays. Une loi mémorielle pourrait être envisagée comme une solution, pour instaurer la décrispation entre les deux peuples.
En France, le concept de lois mémorielles a été forgé depuis plusieurs années autour de textes essentiels : la loi Gayssot du 13 juillet 1990 qui a instauré le délit de contestation des crimes contre l’Humanité, la Loi du 29 janvier 2001 qui reconnaît publiquement le génocide arménien de 1915, la loi Taubira du 21 mai 2001 reconnaissant la traite et l’esclavage en tant que crimes contre l’humanité et la loi n°2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés.
Il est vrai qu’un tel débat sur la pertinence d’une telle intervention législative pourrait être relancé et conduirait à la division tant la classe politique que la communauté scientifique ainsi que le monde de la presse. Il faut toutefois souligner la différence entre une loi effective comme la Loi Gayssot, assortie de sanctions pénales, et des lois déclaratives comme les trois autres, qui ne font que dénoncer des principes sans assortir de sanctions pénales et affirmer des crimes contre l’humanité (donc déclaration d’un rôle négatif). La loi du 23 février 2005, au contraire, affirmait un rôle positif de la colonisation et ses dispositions ont provoqué la colère des historiens qui n’admettent pas qu’un texte juridique écrive l’Histoire. Sans parler de la polémique qui a remué l’opinion publique notamment dans les pays anciennement colonisés par la France, chez les personnes originaires de ces pays et résidant en France, ou encore dans les départements d’outre-mer a entraîné le retrait de cette disposition dont le gouvernement a entendu se désolidariser. L’article 4 de cette loi a été déclassé par le Conseil constitutionnel (décision du 31 janvier 2006) sur demande du Premier ministre (25 janvier 2006), puis abrogé par voie réglementaire (décret du 15 février 2006).
Ce 17 octobre 2012, la société civile organise une série de commémorations prévues sur des places, des boulevards et des lieux qui ont hautement marqué ces massacres et crimes dans la ville de Paris. Il serait positivement recommandable qu’une proposition de loi venant d’un groupe parlementaire ou un projet de loi émanant du gouvernement pour reconnaître cette période sombres de l’histoire de la France et participer à éviter certains bégaiements de l’histoire.
Fayçal Megherbi, avocat au Barreau de Paris
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