Le résultat de Marine Le Pen à l’élection présidentielle (6millions et demi de voix) soit presque 18% des suffrages, le plus haut réalisé par l’extrême droite excepté le score conjugué de Jean-Marie Le Pen et Bruno Mégret en 2002, interpelle l’ensemble des citoyens et engage de façon directe la responsabilité de partis politiques qui se prétendent démocratiques mais qui, par veulerie, calcul politicien, proximité idéologique portent une lourde responsabilité dans la progression du FN, son enracinement et l’émergence en sa faveur d’un vote non plus de protestation mais d’adhésion rendu possible par la légitimation des thèmes développés par l’extrême droite – islamophobie et racisme anti-Roms par exemple.
L’orientation prise par la campagne de Sarkozy dès la proclamation des résultats du premier tour ne fera qu’accentuer une tendance lourde de la droite à chasser sur les terres du Front national et diffuser ses thèses racistes.
Si le score du FN révèle un mal-être, ce constat ne peut à lui seul représenter une explication. Ce score est avant tout le résultat d’une stigmatisation systématique et répétée de catégories de la population sous prétexte de culture, de religion ou de modes de vie qui seraient incompatibles avec la République.
La récupération par Marine Le Pen de la thématique de la laïcité n’a pas été dénoncée avec toute la vigueur nécessaire et a même fait l’objet de compromissions voire de collusion tout à fait inquiétantes. Ces alliances douteuses ont, de façon consciente ou non, ouvert un espace nouveau qui a permis au FN de déborder sur des tranches nouvelles de l’électorat.
Aujourd’hui, diaboliser simplement le FN ne peut suffire. Il faut s’attaquer au cœur de son dispositif idéologique tout en apportant de réelles réponses économiques et politiques au besoin de protection qui s’exprime et qui alimente le nouveau fond de commerce du FN, parti qui, à la nécessaire convergence des intérêts des travailleurs, qu’ils soient français ou étrangers, répond par la désignation d’un ennemi intérieur et par le racisme facteur de division et même de haine.
Face à cet affront national, un sursaut des consciences est impératif. Le racisme n’est pas une opinion, c’est un délit qui ouvre la voie au délitement d’une société. Aujourd’hui, la priorité est de mettre en échec la résistible ascension du FN.
La question sociale reste centrale : réforme du système économique, justice sociale, égalité des droits, lutte contre les discriminations ne peuvent plus longtemps être évacuées du débat électoral, à nous d’agir sans attendre le résultat du second tour.
Mouloud Aounit, Président d’honneur du MRAP