Des digues autour du Front national sont en train de céder, ce qui devrait permettre au parti de Marine Le Pen d’avoir des députés à l’Assemblée nationale à l’issue du second tour des législatives dimanche, une situation dénoncée par la gauche.
Florian Philippot, porte-parole du « Rassemblement bleu Marine », a estimé que le FN, qui a diffusé lundi une liste de huit personnalités de droite et de gauche à faire battre, pouvait faire élire cinq à sept députés.
Louis Aliot, le numéro deux du FN, a annoncé le retrait « sans contrepartie » d’un candidat FN dans les Pyrénées-Orientales. Le retrait d’Irina Kortanek, candidate dans la 2e circonscription de ce département, profite à l’UMP Fernand Siré, devancé par une socialiste.
En revanche, le candidat UMP Etienne Mourrut n’a pas répondu aux sollicitations du FN qui lui offrait une forme de réciprocité et a annoncé son maintien dans la 2e circonscription du Gard, au détriment de l’avocat « mariniste » Gilbert Collard.
Il justifie dans un communiqué sa décision par la volonté de s’opposer à une candidate de gauche qui représente un projet politique « contraire à l’intérêt de la Nation », mais aussi vis-à-vis du candidat du FN qui « préconise l’abandon de l’euro et le retour au repli identitaire ».
Le parti de Marine Le Pen a néanmoins bénéficié depuis dimanche soir d’un désistement officiel dans les Bouches-du-Rhône, d’appels du pied plus ou moins grossiers et du maintien d’une candidate socialiste dans le Vaucluse.
PIÈGE
SOS Racisme dénonce trois « candidats de la honte », deux de l’UMP, l’ex-ministre Nadine Morano et Roland Chassain, et une du PS, Catherine Arkilovitch, que l’association accuse de faire le jeu du Front national.
Dès dimanche soir, Nadine Morano, en ballottage difficile et qui a échappé à la ‘liste noire’ de Marine Le Pen, avait appelé les électeurs du FN à se reporter sur sa candidature sans « aucun état d’âme ». L’ancienne ministre réitère ses propos dans l’hebdomadaire d’extrême droite Minute.
La droite républicaine n’existe plus en France, a estimé pour sa part le ministre de l’Economie, Pierre Moscovici, au lendemain de la décision par l’UMP de ne pas soutenir la stratégie PS de désistement réciproque contre le FN au second tour des élections législatives.
Le FN, qui a obtenu 13,6% au premier tour, n’a pas totalement tiré profit de ce nouveau climat.
Dans le Gard, donc, Gilbert Collard, arrivé en tête au coude à coude avec la socialiste Katy Guyot, n’a pas obtenu le désistement d’Etienne Mourrut.
Le deuxième tour opposera donc dans une triangulaire incertaine Gilbert Collard, qui a obtenu 34,57% des voix au premier tour, Katy Guyot (32,87%) et Etienne Mourrut (23,89%)
En revanche, l’UMP Roland Chassain, arrivé troisième dans la 16e circonscription des Bouches-du-Rhône, avait annoncé lundi son retrait au profit de la candidate du Front national face au socialiste Michel Vauzelle.
« ATTENTAT POLITIQUE »
Dans le Vaucluse, à Carpentras, la candidate socialiste de la 3e circonscription, Catherine Arkilovitch, a décidé, après une valse-hésitation, de se maintenir pour le second tour, ce qui accroît les chances de la FN Marion Maréchal-Le Pen.
A Marseille, le FN Stéphane Ravier, en tête au premier tour, se retrouve seul face à la dissidente PS Sylvie Andrieux, poursuivie pour détournement de fonds publics.
Un « front républicain » se dessine à gauche, puisque les candidates Front de gauche et EELV appellent à battre l’extrême droite. Mais Stéphane Ravier peut espérer de bons reports de l’électorat de l’UMP, dont le candidat ne s’est pas qualifié.
Le parti de Marine Le Pen peut également tirer parti de la position fixée lundi par la direction de l’UMP.
Le mouvement dirigé par Jean-François Copé a en effet opté au terme d’un bureau politique extraordinaire pour le ni-ni (ni Front national, ni front républicain) dans les circonscriptions où un candidat de gauche se retrouve seul en lice face à un candidat d’extrême droite.
Dénonçant cette décision, la Licra (ligue contre le racisme et l’antisémitisme) estime que cette situation « exige un front républicain renforcé et maintient son appel « à une convergence républicaine ».
L’enjeu est de « contribuer, ou non, à mettre sur le chemin de l’exercice du pouvoir, à plus ou moins court terme, un parti qui n’est pas en accord avec les valeurs fondamentales de la France », écrit-elle dans un communiqué.
Florian Philippot a jugé « parfaitement faisable » pour le FN d’avoir cinq à sept députés. Il y a plusieurs circonscriptions où nous sommes très largement en mesure de l’emporter, que ce soit en duel ou en triangulaire », a-t-il dit sur France 2.
Il a répété que le « Rassemblement bleu Marine », qui s’est qualifié dans 61 circonscriptions pour le second tour, entendait se maintenir quasiment partout.
Il a cependant précisé, comme l’avait dit la veille Marine Le Pen, qu’il y aurait « une ou deux exceptions, très rares ».