Le rythme des reconduites à la frontière s’est sensiblement accru depuis mai, a indiqué mercredi le ministère de l’Intérieur, qui confirme qu’au rythme actuel le chiffre de 30.000 expulsions pourrait être atteint en 2011, comme l’a annoncé le Figaro.
La Cimade y a vu mercredi l’effet de la récente loi sur l’immigration,
d’accord sur ce point avec la place Beauvau.
Mais quand l’Intérieur se félicite de ce texte, l’association oecuménique
de soutien aux immigrés en a dénoncé mercredi « une application systématique des mesures les plus répressives ».
Selon Le Figaro daté du 28 juillet, « les 28.000 reconduites pour 2011 vont être portées à 30.000 en 2011 ». S’il indique qu’aucun nouvel objectif n’a été officiellement fixé, le ministère de l’Intérieur relève qu’il y a eu « près de 15.000 reconduites sur les six premiers mois de l’année, soit une moyenne de 2.500 par mois ».
Surtout, ajoute-t-on, depuis mai, les services de lutte contre
l’immigration clandestine ont relevé « une réelle inflexion » des chiffres.
Ainsi, en mai, 3.397 étrangers en situation irrégulière ont été renvoyés dans leur pays, contre 2.563 lors du même mois l’année précédente, selon le Figaro.
Même si cette « inflexion » est antérieure à sa promulgation le 16 juin, le
ministère y voit l’effet direct de la loi sur l’immigration. « Depuis début
juillet, tous les décrets sont publiés », fait-on valoir place Beauvau.
Fin juin, le ministre de l’Intérieur Claude Guéant expliquait qu' »au vu de
la mise en oeuvre » du texte, il se réservait « la possibilité d’augmenter les
objectifs » de 28.000 expulsions fixé par son prédécesseur Brice Hortefeux.
Principaux outils dans l’arsenal de l’administration, l’allongement de 32 à 45 jours du délai de rétention administrative, ce qui offre plus de temps pour obtenir des laissez-passer consulaires et un pouvoir plus grand accordé au juge administratif, désormais compétent pour trancher sur un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière.
La loi a aussi repoussé à cinq jours (au lieu de deux auparavant)
l’intervention du juge des libertés et de la détention (JLD) lorsqu’un
étranger en situation irrégulière est placé en rétention administrative.
Le texte a également permis de remédier à un vide juridique qui permettait depuis fin 2010 à des sans-papiers d’obtenir une annulation de leur expulsion devant la justice administrative.
Le Groupe d’information et de soutien aux immigrés (Gisti) avait ainsi
indiqué en janvier qu’ils étaient « des centaines » d’étrangers placés en
rétention administrative à avoir été libérés, faute de transposition d’une
directive européenne en droit français.
Cette directive « retour », pourtant dénoncée par les organisations de
défense des droits de l’Homme, était à certains égards plus favorable aux étrangers sans papiers que la législation française de l’époque.
Le net rebond des expulsions a été sévèrement commenté mercredi par la Cimade qui a regretté des décisions « totalement stéréotypées ».
« L’administration n’a pas hésité à priver de liberté de nombreux étrangers pour essayer de les expulser sans leur laisser de délai de départ. Cette pratique est clairement contraire au droit européen », déplore la Cimade.
L’association relève que « plusieurs magistrats judiciaires et
administratifs ont déjà annulé des décisions d’éloignement ou refusé de
prolonger l’enfermement des étrangers visés, estimant notamment que
l’application de la nouvelle loi est contraire au droit européen ».