LES REPONSES DE MARIE-GEORGE BUFFET
Collectif » L’égalité d’abord ! «
1. Aujourd’hui, au niveau national, on ne compte la présence d’aucun député français issu de toute la diversité de l’immigration. Il en va de même au niveau des 36 000 communes du pays où on ne compte aucun maire. La diversité de la population de la France est tout simplement ignorée par les institutions les plus décisives.
Quelles mesures entendez-vous prendre pour que les diverses Assemblées élues ouvrent grandement leurs portes en 2007 et 2008 à des représentants de cette composante de la société française impatiente de voir des élus représenter aussi leurs aspirations et revendications spécifiques ?
Pour ce faire, acceptez-vous que ces représentants soient choisis sur la base de l’engagement à côté de ces populations, de l’expérience de terrain, de l’écoute et de la compétence ?
Marie-George Buffet
Avec la quasi absence des catégories populaires, des femmes, des jeunes, de la diversité d’origine, les institutions, les assemblées élues ne sont pas à l’image de la société française.
L’exigence de démocratie et d’égalité des droits nécessite de bousculer cette état de fait. Cela passe, entre autres, par l’établissement de l’égalité politique. Celle-ci est partie intégrante de mon combat, comme l’illustre ma détermination en faveur du droit de vote et de l’éligibilité des résident-es étrangers.
Pour ces raisons, j’attache beaucoup d’importance à la représentation au sein des assemblées élues de citoyen-nes issus de l’immigration.
Concernant les prochaines élections législatives, dans le cadre du rassemblement auquel je continue d’œuvrer avec mes ami-es du PCF, je propose plusieurs critères pour définir le choix des candidat-es : la parité, le renouvellement, la jeunesse et la diversité des origines. Ces critères devront également prévaloir pour les élections municipales de 2008. Il est indispensable de faire preuve de volontarisme politique dans ce domaine.
Bien entendu, ces hommes et ces femmes seront toutes et tous choisis sur la base de leurs engagements, de leurs compétences, de leur expérience de terrain.
Mais cette démarche volontariste ne saurait suffire. Il est indispensable, pour faire évoluer de façon significative la représentation de la société française au sein des assemblées élues, de mettre en œuvre le scrutin proportionnel à toutes les élections, d’adopter un statut de l’élu-e qui permettra à toutes et à tous d’exercer un mandat, quelle que soit sa situation sociale ou professionnelle et d’accorder aux résidents étrangers le droit d’être éligibles.
Collectif » L’égalité d’abord ! «
2. Voilà maintenant plus de trente ans que le débat sur le droit de vote d’abord et celui sur l’éligibilité des résidents étrangers ensuite est lancé. À plusieurs reprises, des promesses n’ont pas été tenues. Pourtant, s’agissant des municipales comme des législatives, la France demeure à la traîne en Europe. Nos voisins européens s’étonnent du retard du pays des Droits de l’Homme.
Pouvez-vous affirmer solennellement que le droit de vote aux étrangers et leur droit à l’éligibilité seront l’une de vos priorités ?
Dans quelles conditions et sous quels délais ?
Marie-George Buffet
Oui, je m’y engage. Ces hommes et ces femmes travaillent, ont une vie familiale, paient des impôts, participent souvent à la vie associative ou syndicale. Ils ne doivent plus être des citoyens de seconde zone. Pour moi, le droit de vote ne peut pas être séparé du droit à l’éligibilité.
Dès 1992, mon parti, le PCF, avait dénoncé l’injustice qui consistait à accorder le droit de vote et d’éligibilité à un ressortissant de l’Union Européenne récemment établi sur notre sol et à le refuser à un salarié algérien ou marocain résidant en France depuis 30 ans.
Je déplore que les gouvernements successifs aient manqué de courage politique pour traduire cette promesse en actes. C’est pourtant une exigence pour sortir de la crise démocratique actuelle, une exigence du « vivre ensemble » et une des mesures à prendre pour lutter contre le racisme et les discriminations.
Un projet de loi a été voté par les député-es à l’Assemblée nationale 3 mai 2000. Il est consternant qu’il n’ait pas été mis à l’ordre du jour du Sénat à l’époque, malgré les demandes répétées de mes ami-es du groupe communiste républicain citoyen. Je m’engage à présenter un nouveau projet de loi en ce sens au vote du Parlement, tout de suite, pour son application dès les élections municipales de 2008.
Mais je propose d’aller plus loin et d’accorder le droit de vote et d’éligibilité aux résidents étrangers à toutes les élections, après trois ans de résidence pour les élections locales et dix ans pour les élections nationales. J’inscris cette proposition dans le cadre du débat constitutionnel que j’entends mener.
Collectif » L’égalité d’abord ! «
3. Malgré la création louable de la HALDE et ses résultats encourageants au regard de la faiblesse de ses moyens, le quotidien d’une partie de nos concitoyens est fortement imprégné de multiples discriminations.
Aussi les événements de novembre 2005 ont-ils révélé l’inquiétude de nombre de nos concitoyens, immigrés ou français issus de l’immigration, qui s’interrogent sur leur statut au sein de la République. Ils ressentent un abandon à leur endroit qui mine leur confiance dans l’avenir.
Ils vivent une discrimination politique, culturelle, sociale, économique et institutionnelle.
Quelles sont les mesures concrètes que vous envisagez sur tous ces registres afin d’éradiquer ces discriminations et promouvoir une égalité réelle pour tous? Selon quel calendrier ? Avec quel objectif de résultats ?
Marie-George Buffet
Je m’engage à prendre toutes dispositions de nature à lutter en profondeur et durablement contre toutes les discriminations, contre toutes les formes de racisme et de xénophobie. C’est une question de dignité, partie intégrante de mon combat humaniste, contre les politiques libérales qui divisent, qui mettent en concurrence les êtres humains. Mon projet de société se fonde sur des valeurs d’égalité, de justice, de solidarité.
Je propose que la Lutte contre les discriminations soit déclarée Grande Cause Nationale pour toute la durée d’une législature. Cela afin de lui donner l’ampleur et la durabilité nécessaires. Les discriminations résultent de systèmes complexes, d’opinions, de perceptions, de pratiques, de représentations qui traversent la société. Il faut une volonté politique, des projets, des actions et des luttes persévérantes pour établir l’égalité des droits.
Durant la législature je propose, entre autres mesures, de :
* renforcer le rôle de la Haute autorité de lutte contre les discriminations en lui donnant plus de moyens, en la décentralisant et en la démocratisant ;
* créer un corps d’inspecteurs d’Etat de lutte contre les discriminations pour les faire reculer dans l’accès à l’emploi privé et public, au logement, aux services publics et aux équipements collectifs sociaux…;
* faire appliquer strictement les lois contre toutes les discriminations, contre tous les racismes ;
* faire respecter l’interdiction des contrôles » au faciès » : des instructions strictes seront données pour que les règles républicaines soient appliquées.
Je propose de donner une place plus importante à l’histoire du colonialisme et de l’esclavage qui a façonné durablement notre inconscient collectif, les préjugés racistes et les pratiques discriminatoires. C’est avec cette même volonté de lutter contre ces préjugés que j’entends développer l’instruction civique à l’école ou encore retirer des textes de la République le mot « race ».
La lutte contre les discriminations spécifiques doit s’articuler avec le combat plus général contre les inégalités sociales. L’ensemble des propositions que je formule dans mon programme y participe. J’entends par exemple :
* consacrer 7% du PIB à l’éducation pour la réussite scolaire de tous ;
* développer des services publics de proximité ;
* créer une Sécurité d’Emploi et de Formation ;
* construire 600 000 logements sociaux.
Collectif » L’égalité d’abord ! «
4. L’histoire de notre pays est riche. Certaines de ses pages sont glorieuses et source légitime de fierté. D’autres sont plus sombres, faites de malheurs, de souffrance et souvent occultées. Ainsi tout un pan de la mémoire nationale est-il effacé.
La France n’écrit pas toute son histoire. Elle ampute son identité et ainsi elle nie l’apport d’une partie des français à l’histoire de l’humanité et à l’histoire particulière de la France.
Certains enfants de France – privés d’avenir parce que présentement discriminés et rejetés ainsi que leurs cultures et spécificités – se trouvent, qui plus est, dépourvus de passé par l’historiographie officielle enseignée dans les écoles et véhiculée dans les médias. Tout est fait pour qu’ils ne ressentent aucune forme temporelle d’enracinement possible dans leur propre pays.
Comment envisageriez-vous régler ce déni d’appartenance à la Cité fait d’évaporation dans l’histoire et d’effacement dans la mémoire ?
Quelles mesures concrètes êtes-vous prêt à prendre pour corriger cette profonde injustice et réhabiliter la place des citoyens issus de l’immigration et de la colonisation dans l’histoire du pays ?
Quelle action entendez vous menez pour qu’il y ait une reconnaissance et un partage de l’ensemble des mémoires de la population française ?
Marie-George Buffet
L’Histoire coloniale de la France pèse évidemment beaucoup dans le rapport avec les ressortissants des anciens pays colonisés.
Les nostalgiques du colonialisme continuent de se manifester, comme on l’a vu à l’occasion de la loi du 23 février 2005 votée par la majorité actuelle ; loi à laquelle je me suis opposée et dont je demande l’abrogation. Certains, avec une certaine impunité, inaugurent des stèles à la gloire de l’OAS : c’est inacceptable.
Je suis choquée par les propos tenus, notamment ces dernières semaines par le Ministre de l’Intérieur ; ils participent d’une conception néocoloniale de la France, en conformité avec le concept « d’immigration choisie » intégré dans la loi adoptée le 24 juillet 2006. J’ajoute sa proposition de créer un ministère de « l’immigration et de l’identité nationale » et d’obliger les candidats au regroupement familial de parler français avant même d’arriver en France est scandaleuse.
Il est important de déconstruire les fondements de l’imaginaire de la République coloniale et de créer les conditions de la réflexion sur son héritage. L’Histoire de la colonisation doit être écrite et enseignée. Bien entendu, c’est aux historiens de le faire, de manière pluraliste, afin qu’une large place soit accordée à la culture et à l’Histoire des pays concernés. Il s’agit d’une question importante pour les personnes originaires de ces pays et pour les générations futures.
Quant aux pouvoirs publics, ils ont un devoir de mémoire à accomplir, ainsi qu’un devoir de reconnaissance de tous les crimes commis dans le cadre du colonialisme.
Je défends l’apprentissage de la langue des parents dans l’école publique.
La France doit aussi changer de politique à l’égard des anciens pays colonisés, comme en Afrique notamment. Elle doit le faire en s’appuyant sur les sociétés civiles et les forces démocratiques de ces pays.
En voulant déclarer la lutte contre les discriminations « Grande Cause Nationale »pendant la durée d’une législature, je souhaite que le débat sur notre histoire puisse traverser la société française pour tendre à modifier durablement les mentalités et comportements.
Collectif » L’égalité d’abord ! «
5. L’école a longtemps été un vecteur de mobilité sociale ascendante. Aujourd’hui, elle remplit de moins en moins cette fonction. Les premières victimes en sont les catégories sociales défavorisées et parmi elles une partie des jeunes issus de l’immigration qui vivent à la périphérie des villes, cumulent les difficultés, affichent les taux d’échec et d’exclusion scolaire les plus élevés.
De quel service public de l’éducation la France a-t-elle aujourd’hui besoin pour assurer l’avenir de tous ses enfants?
Qu’envisageriez-vous pour rendre à l’école son rôle et lutter contre l’échec scolaire? Avec quels moyens ?
Quelle sera votre position sur l’ouverture d’écoles confessionnelles qu’elles soient juives, musulmanes ou chrétiennes ?
Comment organiserez-vous l’égalité de traitement ?
Marie-George Buffet
J’entends œuvrer à une école de l’égalité, de la justice et de la réussite pour tous, qui doit répondre à un triple enjeu :
* un enjeu de justice sociale, ce qui suppose une action résolue contre les inégalités et la rupture avec le rôle ségrégatif d’accès au savoir ;
* un enjeu de culture qui suppose un haut niveau de formation scolaire commune ;
* l’enjeu des moyens que la nation entend consacrer à l’école. Je propose de porter à 7 % du PIB le budget de l’éducation nationale et d’engager un plan massif de recrutement et de formation sur 5 ans, de 150.000 enseignants et 45.000 personnels ATOSS de l’éducation nationale.
Bien évidemment, cela implique des transformations tant des contenus d’enseignement que des méthodes, des pratiques et du fonctionnement de l’institution à partir de ce qui est nécessaire aux élèves ayant le plus de difficultés. Je propose également la création d’un Fonds national de lutte contre les inégalités à l’école ayant pour fonction de coordonner et de répartir les moyens financiers, pédagogiques et humains destinés à mettre en œuvre les actions nécessaires au recul des inégalités d’origine sociale dans l’appropriation des savoirs et des compétences par tous les élèves. Il aurait vocation à intervenir pour assurer une véritable gratuité tout au long de la scolarité, développer un programme d’études et de recherche sur les inégalités scolaires, de formation et d’information des personnels, d’aider les collectivités territoriales qui manquent des ressources suffisantes. Ce fonds sera alimenté par des fonds publics inscrits au budget de l’Etat et géré démocratiquement par un conseil constitué des représentants de tous les partenaires du système éducatif.
Par ailleurs, je me prononce pour que soit engagé un processus d’unification du privé et du public dans un service national de l’enseignement. Tous les acteurs de l’école, tous les citoyens seront associés aux décisions.
Collectif » L’égalité d’abord ! «
6. La législation ne cesse de durcir les conditions de séjour des étrangers sur le territoire en devenant une fabrique de sans-papiers. Beaucoup d’entre eux travaillent depuis de nombreuses années, cotisent, payent des impôts, envoient leurs enfants à l’école. L’affaire de Cachan comme les incendies meurtriers d’hôtels à Paris montrent que cette population est menacée par toutes les formes de fragilité y compris l’exposition à la mort. Cette situation, ces drames sociaux, ces drames humains sont-ils tolérables dans une démocratie avancée comme la France ?
Êtes-vous pour la régularisation des sans-papiers dans quels termes et dans quelle ampleur ? Quelle est votre position sur les lois en vigueur sur l’immigration ?
Quelle politique comptez-vous mener pour faire des immigrés un sujet de droit au lieu d’être réduit à un objet de répression, d’exploitation éhontée pour certains, de mépris pour d’autres ?
Marie-George Buffet
Les migrations de populations ont pris une dimension internationale nouvelle et durable. Elles résultent de la misère – conséquence, pour une large part, des politiques colonialistes d’hier – et d’un ordre économique mondial injuste qui déstructure les sociétés et étouffe leurs possibilités de développement.
Elles sont encouragées par des employeurs qui recherchent une main-d’oeuvre sans droits et à bon marché. Les solutions administratives et répressives sont inhumaines et inefficaces. Des « quotas » ne feraient que renforcer le pillage des femmes et des hommes en faveur des employeurs des pays développés.
Je propose des mesures d’efficacité et de dignité qui consistent à :
* Abroger la loi du 24 juillet 2006 qui institue « l’immigration choisie » c’est-à-dire une politique néocoloniale, et nie le droit d’asile ainsi que toutes les lois répressives et régressives qui ont été prises à l’égard des migrant-s ;
* Faire reculer les situations de clandestinité par la régularisation avec un titre de séjour de 10 ans de tous les sans-papiers, le respect du droit d’asile, des conditions d’accès à la nationalité facilitées, la suppression des visas de court séjour, des zones d’attente et des centres de rétention qui ont terni l’image de la France ;
* Fixer les modalités du droit d’installation des étrangers dans le respect absolu de la dignité et des droits fondamentaux de la personne, en relation avec les principes essentiels de développement des pays du Sud et de l’objectif de co-développement de tous les peuples ;
* Supprimer les restrictions imposées au regroupement familial ;
Mettre en place les moyens nécessaires à l’accueil et à la bonne insertion des étrangers ;
* Mener la lutte contre l’exploitation du travail clandestin ;
Supprimer la double peine ;
* Développer les partenariats avec les pays d’émigration afin de mettre fin à l’exode de la misère et à assurer la liberté de circulation et la régularité du séjour des migrant-es.
Par ailleurs, je m’engage à proposer au Parlement la ratification de la Convention des Nations unies sur la protection des travailleurs migrants et des membres de leur famille.
On oublie souvent de dire que s’il y a en France environ 4 millions d’immigrés, naturalisés ou non, il y a également 2 millions de Français qui vivent à l’étranger. Les migrations humaines ne sont pas seulement un produit du passé, c’est aussi l’avenir de nos sociétés.
Collectif » L’égalité d’abord ! «
7. Quels que soient leurs origines ou leurs milieux sociaux, tous les citoyens doivent pouvoir s’en remettre à la Justice et à la Police en toute confiance.
Un certain nombre de lois répressives, des pratiques policières humiliantes et la multiplication des contrôles au faciès et le harcèlement policier, dont sont l’objet certaines populations ont approfondi le sentiment d’insécurité pour les victimes.
Quelles mesures prendre pour que la police cesse les contrôles d’identité abusifs et dégradants et que la justice traite de manière équitable les victimes des violences policières et des mal-nommées bavures policières ?
Marie-George Buffet
Je compte abroger l’ensemble des dispositions répressives prises depuis 2001 dans le domaine de l’insécurité, de la justice comme de l’immigration. Elles stigmatisent des catégories de populations et ne peuvent que favoriser les comportements eux-mêmes stigmatisants.
Loin de répondre aux problèmes sociaux, d’insécurité…, elles les accentuent et détournent l’attention populaire vers des boucs émissaires. L’interdiction des contrôles « au faciès » doit être absolument respectée. Des instructions strictes doivent être données pour que les règles républicaines soient appliquées.
La politique du » chiffre » doit cesser : elle ne peut qu’entraîner des dérives dangereuses.
Je suis pour la suppression des BAC et, à l’inverse, pour que soit développée une police de proximité.
La CNDS, dont le nombre de saisines a considérablement augmenté, doit avoir les moyens d’exercer ses missions de contrôle.
Quant à la justice, ses moyens humains et matériels doivent être considérablement augmentés. C’est le cas, notamment de la justice des mineurs, que le gouvernement de droite au pouvoir remet en cause, loi après loi. Toutes les étapes de la procédure pénale ont été marquées, ces dernières années, par une véritable dérive répressive. Il faut renforcer les droits de la défense, et notamment supprimer les comparutions immédiates et prévoir la présence de l’avocat à tous les stades de la procédure.
Collectif » L’égalité d’abord ! «
8. Actuellement, la politique étrangère de la France est encore fortement imprégnée de fondements et de pratiques de type néo-colonial à l’image de ce qui se passe en Côte d’Ivoire, au Tchad et en Centrafrique.
Alors que la politique étrangère de la France doit s’appuyer sur les valeurs de liberté, de solidarité et de respect des droits des peuples et poursuivre des objectifs de partage, de coopération et d’échanges notamment scientifiques et technologiques et de développement des formations
Que peut faire la France au niveau de ses relations bilatérales pour contribuer à la lutte contre la pauvreté, l’endettement et l’éradication des pandémies qui ravagent l’Afrique ?
Que peut faire la France au niveau des institutions, politiques, économiques et financières internationales (Communauté Européenne, Banque Mondiale, FMI, OMC, etc.) dans le même objectif ?
La persistance du conflit Israélo-Palestinien est une menace pour la paix dans la région et dans le monde, chacun le voit à la lumière de l’actualité. Quel engagement prenez-vous pour faire respecter le droit international et l’ensemble des résolutions de l’ONU dans cette partie du monde pour qu’enfin le peuple palestinien recouvre ses droits et libertés fondamentales et que le peuple israélien puisse vivre dans la sécurité ?
Que peut faire la France pour que l’Europe soit mise à contribution dans cette perspective ?
Marie-George Buffet
La France perpétue en Afrique une stratégie de domination visant à défendre ses intérêts et ceux de grands groupes industriels et financiers. Il faut en finir avec la « Françafrique » : si un bilan complet, objectif, sans complaisance doit être effectué dès les premières années de la nouvelle présidence, l’élaboration d’une nouvelle politique africaine doit être mise en œuvre immédiatement, avec transparence, démocratie, respect des souverainetés, intérêt réciproque… La politique de la France en Afrique ne doit plus être du domaine réservé du Président de la République, mais être placée sous le contrôle systématique du parlement afin d’assurer la transparence des actes.
Tous les accords d’Etat à Etat y compris les accords particuliers en matière de défense et de matières premières signés au lendemain des indépendances doivent être rendus publics dans leur intégralité. Ils doivent aussi être abrogés car ils institutionnalisent et perpétuent la dépendance et la domination.
Je me propose de porter le taux de l’aide française au développement à 0,7%. Son attribution doit appuyer toutes les initiatives concourant à la démocratisation, au renforcement de l’Etat de droit et au respect des principes universels des droits de l’homme.
Le Parlement français doit être consulté. La société civile africaine doit être associée, avoir son mot à dire quant à son utilisation. Je suis pour annuler la dette, sans conditions, mettre un terme aux plans d’ajustement structurel, taxer les mouvements des capitaux, placer les systèmes bancaires, les organisations internationales, les unions entre Etats ( UE, Alena…) sous contrôle démocratique parlementaire. Et cela avec obligation de transparence des politiques choisies et des actes.
Je veux développer une politique de coopération aidant les pays du Sud à tourner leur activité vers la satisfaction de leurs propres besoins. Il faut complètement revoir les accords UE-ACP. Ils visent surtout à intégrer les économies africaines dans l’économie de marché au plan mondial. Ils ne tiennent pas comptent des besoins de développement économique et humain. Pour répondre à ces besoins il faut rompre avec le libre échange généralisé, la libéralisation, la privatisation, la marchandisation.
Je propose que ces accords soient entièrement refondés, dans la transparence sous contrôle de la société civile et des forces démocratiques africaines. Ils doivent permettre de lutter contre la pauvreté et répondre aux besoins économiques, sociaux et culturels. Il y a urgence à reconnaître aux peuples africains le droit à la sécurité alimentaire, au développement industriel et agricole, à celui de services publics permettant l’accès de tous aux biens communs de l’humanité que sont la santé, l’eau, l’énergie, l’éducation.
Je pense qu’il faut une réforme de l’O.M.C. afin que, dans le cadre du système des Nations Unies, celle-ci régule effectivement le commerce mondial et cesse d’être un instrument de dérégulation libérale, afin que soient contrôlées les activités des firmes transnationales et que soient respectés les droits des peuples. Ce qui implique une révision en profondeur des finalités de l’OMC et des accords existants, en particulier de l’AGCS, de l’accord sur l’agriculture, celui sur les droits de propriété intellectuelle, celui sur les obstacles au commerce.
Concernant Israël, j’ai fait de la tenue d’une Conférence internationale sous l’égide de l’ONU pour la paix au Proche-Orient, l’un des quinze axes de mon programme. Il faut agir, prendre l’initiative, chercher des appuis et des alliés dans le monde, rappeler en permanence l’exigence du respect du droit international et des résolutions de l’ONU, contribuer à la mobilisation des opinions publiques. Il faut rétablir immédiatement tous les financements internationaux de l’Autorité palestinienne, lever les sanctions, les bouclages et tout ce qui nourrit la pauvreté et le chômage. Quant à la résolution du Parlement européen d’avril 2002 qui demande la suspension de l’accord tant qu’Israël ne respectera pas les droits des Palestiniens, elle doit être appliquée.
LES REPONSES DE SEGOLENE ROYAL
1. Vous soulignez, avec raison, l’absence d’élus et de personnalités issus de la diversité dans nos institutions.
La promotion de la diversité républicaine est un engagement fort non seulement du Parti socialiste, mais aussi des formations politiques représentées par Christiane Taubira et Jean-Pierre Chevènement qui m’ont fait l’honneur de soutenir ma candidature.
Nous avons déjà pris des engagements forts pour les élections législatives de 2007 en réservant de nombreuses circonscriptions à des candidats issus de la diversité. J’ai récemment nommé en tant que porte-parole une jeune femme issue de l’immigration marocaine, Najat Vallaud-Belkacem. A l’occasion de tous les prochains scrutins, je veillerai à ce que nos listes et nos candidats ressemblent à notre société afin de mieux prendre en compte ses aspirations.
2. Vous m’interrogez sur le retard européen de la France concernant le droit de vote et d’éligibilité des extra-conimunataires aux élections locales.
En Europe, 17 pays ont accordé, sous des formes diverses, le droit de vote aux résidents non ressortissants de l’Union Européenne, et je regrette que la France continue de refuser cette avancée démocratique. La droite française s’y est toujours opposée, quels que soient les discours de circonstances.
Je suis favorable au droit de vote des résidents étrangers aux élections locales. Cette réforme, proposition ancienne de la gauche, viendra ainsi compléter la citoyenneté de résidence que François Mitterrand avait en son temps mise en place en accordant aux étrangers le droit de participer à la vie associative et syndicale.
Il est à mes yeux tout à fait légitime que l’étranger non communautaire, résidant en France depuis plus de 5 ans, puisse voter aux élections locales, à l’instar des ressortissants communautaires.
Cette extension du droit de vote est un impératif de justice, et un facteur déterminant d’intégration politique mais aussi sociale des étrangers demeurant et travaillant en France.
Accorder le droit de vote aux étrangers pour les élections locales suppose une révision de la Constitution. Cette proposition fera partie de la réforme institutionnelle que je compte soumettre aux citoyens par référendum dans les six mois suivant l’élection présidentielle.
3. Vous évoquez la question majeure des discriminations, leur ampleur et leurs terribles conséquences.
Les discriminations, sous toutes leurs formes, constituent des formes nouvelles et supplémentaires d’inégalités. L’origine ethnique, le genre, le handicap, l’âge viennent souvent s’ajouter aux inégalités socio-économiques et les amplifier. Les politiques de lutte contre les discriminations doivent inventer les nouveaux outils de l’égalité républicaine. Nous devons mettre en place une politique éducative efficace pour faire évoluer les mentalités.
Je propose de placer sur un pied d’égalité toutes les luttes contre toutes les formes de discriminations. Toutes les pratiques discriminatoires sont condamnables et doivent être combattues avec la même vigueur. Les moyens juridiques donnés tant à la HALDE qu’aux victimes pour lutter contre ces discriminations seront égalisés.
Je souhaite aussi donner à la HALDE des moyens à la hauteur de l’enjeu. Des moyens humains et financiers doivent permettre à la HALDE d’entreprendre des campagnes éducatives et de généraliser les pratiques de testing dans l’ensemble de la société. En matière pénale, la charge de la preuve sera aménagée pour mieux protéger les victimes.
4. Vous abordez la question de la mémoire et de l’histoire et vous avez raison de rappeler que l’enracinement dans l’Histoire est une condition essentielle de la construction de soi, du vivre-ensemble.
Le Parti socialiste et la gauche tout entière se sont offusqués de l’inscription dans la loi «des aspects positifs de la colonisation ». L’Histoire de France a des pages glorieuses, mais aussi ses pages noires et ses zones d’ombre : le rétablissement de l’esclavage, la Commune de Paris, Vichy, la guerre d’Algérie font autant partie de notre histoire que La Révolution française et la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, la Résistance ou l’Abolition de la peine de mort.
L’Histoire de la France contemporaine est aussi une histoire de l’immigration: immigration des Belges, des Italiens, des Polonais, des Espagnols et des Portugais; plus récemment, l’immigration venue du continent africain. Un Français sur quatre a un grand parent d’origine immigrée. Rien qu’au cours des l9ème et 20ème siècles, la France a accueilli près de 30 millions d’immigrés. C’est sans doute une des raisons pour laquelle rien de ce qui se passe dans le monde ne nous est indifférent.
Le rôle de l’immigration dans notre histoire et notre identité peut être mieux enseigné. Il est temps que l’histoire de l’immigration en France trouve sa place. C’est pourquoi je salue l’ouverture prochaine de la Cité nationale de l’Histoire de l’Immigration dans les lieux mêmes de l’ancien musée des Colonies et considère que l’enseignement actuel de l’histoire respecte La vérité historique de la colonisation sans qu’il soit nécessaire de la corriger «d’aspects positifs » contestables.
5. Vous rappelez le rôle éminent de l’école et sa fonction d’émancipation, notamment pour les enfants des classes défavorisées.
Comme vous le savez sans doute, j’ai placé l’éducation au coeur du Pacte présidentiel que je propose aux Français.
Le modèle de société que je veux promouvoir implique que l’éducation puisse préparer tous les jeunes à la pratique d’une citoyenneté pleine et entière, les faire accéder à l’exercice libre de la raison et leur donner une qualification permettant de trouver un emploi. Cette priorité signifie que la société dans son ensemble doit se mobiliser pour son Ecole et que notre objectif doit être la réussite de tous.
La politique conduite depuis cinq ans a opéré des coupes sombres dans les budgets et les emplois alors que 150 000 élèves sortent chaque année du système éducatif sans qualification reconnue. Je m’engage à rétablir les moyens supprimés pour que notre école puisse donner la meilleure formation possible à tous les élèves.
De plus, je souhaite que les établissements situés en zone d’éducation prioritaire bénéficient de moyens nettement plus importants qu’actuellement, de l’ordre de 25 % de plus que la dotation ordinaire. Toujours dans les ZEP, les effectifs des classes de CP et CE1 seront limités à 17 élèves par classe et chaque établissement sera doté d’une infirmière et d’une assistante sociale.
Au-delà des moyens indispensables au bon fonctionnement de notre école, je propose que tout au long de la scolarité jusqu’au collège, soit mis en place un soutien scolaire gratuit pour tous les élèves. Ce soutien scolaire sera encadré par des enseignants – sur la base du volontariat et en contrepartie d’une rémunération – ou assuré par des répétiteurs.
Je souhaite également diversifier et d’enrichir l’offre de formation dans les écoles et les établissements situés dans les quartiers populaires et en zone rurale isolée avec La création, dans tous Les établissements, ou groupes d’établissements concernés, de pôles d’excellence. La carte scolaire sera reformée pour supprimer les ghettos scolaires et donner le choix entre deux établissements car une mixité sociale effective est un facteur d’équilibre et fait progresser l’ensemble des élèves.
Je suis très attachée à la Laïcité, valeur fondamentale de la République française et de son Ecole, qui fait que le respect des convictions de chacun, notamment religieuses doit aller de pair avec la neutralité du service public et de tous ceux qui sont chargés d’une telle mission.
Dans notre République, la liberté du choix de l’établissement est garantie au citoyen. Dans ce cadre, il est tout à fait possible, pour les parents qui le souhaitent, d’envisager la scolarisation de leurs enfants dans un établissement privé dont le caractère propre aurait une dimension confessionnelle. Il est bien entendu que ces établissements doivent respecter les conditions fixées par la loi notamment en matière de sécurité et d’hygiène des Locaux, de respect des programmes officiels et de qualification des personnels.
6. Vous relevez que les lois récentes, de plus en plus restrictives, sur les conditions de séjour des étrangers contraignent des hommes, des femmes et des enfants à se réfugier dans la clandestinité et la précarité.
Je souhaite que les étrangers en situation régulière puissent trouver dans notre pays des conditions d’accueil (conditions de travail, habitat, droit à la vie familiale, etc.) satisfaisantes. Je désapprouve les discours qui visent à stigmatiser l’immigration et les pratiques qui aboutissent à transformer des milliers de personnes en «non-expulsables, non régularisables ». Il va sans dire que je regrette également que la question de l’immigration illégale puisse donner lieu à de la politique spectacle et à des arrestations brutales à quelques mètres d’établissements scolaires.
Les mesures que je propose visent à mettre fin à ces désordres :
– en instituant un visa permettant des aller-retour multiples sur plusieurs années, afin que les migrations s’adaptent aux besoins réels du marche du travail ;
– en rétablissant la règle des 10 ans comme critère de régularisation ;
– en régularisant les sans papiers à partir de critères fondés sur la durée de présence en France, la scolarisation des enfants et la possession ou la promesse d’un contrat de travail.
La fébrilité législative de NicoLas Sarkozy est l’aveu d’une faillite et par son empilement de législations successives, il a réussi le tour de force de faire en sorte en effet que des centaines de milliers d’hommes et de femmes sont sur le territoire national sans être « ni expulsables, ni régularisable s ». Cette situation là est insupportable sur le plan humain tant pour les personnes directement concernées que pour leur famille.
La France n’a pas besoin de loi supplémentaire. Des instructions claires, des services renforcés, des procédures qui fonctionnent vite et bien, cela suffirait.
Il faudra simplement remettre à plat la législation sur l’immigration et avoir la volonté d’organiser une «immigration partagée », c’est-à-dire de se doter des moyens ad hoc pour travailler et négocier avec les pays d’origine dans le respect des personnes. On ne réglera pas le problème de l’émigration si on ne règle pas La question du développement des pays pauvres.
7. La police et les jeunes
La sûreté est un droit pour tous les citoyens et un devoir de L’Etat. Je suis convaincue que l’Autorité de l’Etat n’est légitime que si elle s’impose à tous, dans les mêmes formes.
Les récentes violences de La gare du Nord soulignent à nouveau l’échec de la droite sur la question de La sécurité. Il n’est pas compréhensible qu’un simple contrôle d’un titre de transport dégénère en affrontements aussi violents. Les contrôles d’identité doivent s’effectuer dans le respect dû à la personne humaine. Trop souvent, ils sont vécus comme des humiliations et créent les conditions d’une logique d’affrontement délétère pour notre pays. Force est de constater que la confiance entre les habitants des quartiers et les forces de l’ordre s’est nettement dégradée depuis 5 ans. Cette situation est inacceptable. En définitive, la stratégie du tout répressif dans les quartiers difficiles a rompu le dialogue entre les forces de l’ordre et les jeunes, leur interdisant de développer des politiques de prévention efficace et expliquant en partie la récente hausse des violences contre les personnes de 9,9%.
J’ai souvent dit que je souhaitais instaurer un ordre juste, fait de la compréhension par chacun de ses droits et de ses devoirs. Les violences doivent âtre réprimées et je veux rétablir L’apprentissage de la civilité dès Le plus jeune âge. Les forces de police doivent être respectées dans le cadre de leurs missions. Elles seront d’autant plus respectées qu’elles seront elles-mêmes respectueuses du droit et des citoyens. Je serai sans indulgence pour les brutalités policières et je souhaite en l’espèce que la commission nationale de déontologie soit effectivement plus Largement saisie, même si les modalités de cette saisune restent à débattre.
Tout d’abord, une politique de prévention précoce de la violence sera mise en place grâce à un encadrement éducatif renforcé et La mise en place de tuteurs référents.
Par ailleurs, dans le pacte présidentiel que je propose aux Français, je me suis engagée à créer une nouvelle police de quartier pour mieux assurer la sécurité quotidienne :
– en procédant à une répartition plus juste des effectifs, en donnant la priorité aux renforcements quantitatifs et qualitatifs des zones sensibles ;
– en affectant des policiers expérimentés, bénéficiant d’une réelle différenciation de rémunération, dans les secteurs plus difficiles (avantages de carrières, aides au logement, etc.).
Je veux également aider les victimes :
– en facilitant et modernisant le dépôt de plainte pour briser la loi du silence: amélioration de l’accueil dans les commissariats par la mise en place de travailleurs sociaux de la police nationale, possibilité de déposer plainte via intennet ;
– en mettant un avocat à la disposition des victimes de violences graves dans l’heure suivant le dépôt de plainte.
8. Politique étrangère
Les exigences en matière de démocratie et de respect des droits de L’homme doivent primer sur les intérêts économiques, financiers et commerciaux. Tout accord international, quel qu’il soit, doit donc systématiquement contenir une clause relative au respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et des principes démocratiques. Afin de garantir le respect de ce type de clause, un mécanisme de suivi doit être organisé pour favoriser l’amélioration des droits de l’homme dans les pays tiers.
Le remboursement de la dette représente le principal obstacle au développement des pays du Sud car il absorbe Les ressources qui devraient être consacrées à la satisfaction des besoins fondamentaux des populations. Cependant, l’annulation de la dette des pays pauvres très endettés ne doit pas entraîner une diminution du budget alloué à l’aide publique au développement. Cette stratégie doit permettre de libérer les fonds nécessaires pour réduire de moitié la proportion de la population mondiale vivant dans une pauvreté extrême d’ici à 2015. Nous sommes terribLement en retard sur nos engagements à l’égard des pays défavorisés. Mon objectif est donc de consacrer 0,7 % du revenu national brut à l’aide publique au développement d’ici à 2012.
J’ai pris l’engagement, dans le Pacte présidentiel de proposer à nos partenaires européens, une initiative pour une Conférence internationale de paix et de sécurité au Proche-Orient. Les Etats-Unis seront évidemment associés à cette initiative. L’objectif est la recherche d’une solution du conflit basée sur l’affirmation d’une réalité fondamentale que je veux rappeler ici il n’y a pas d’autre solution au Proche-Orient qu’une paix juste et durable sur la base d’une double exigence, le droit de l’Etat d’lsraël à l’existence et à la sécurité et le droit des Palestiniens à un véritable Etat souverain et viable dans lequel ils pourront mener une vie digne. Il est essentiel de garantir pour lsrael comme pour la Palestine l’assurance de vivre en sécurité à l’intérieur de frontières reconnues internationalement. Les négociations devront s’appuyer sur les résolutions des Nations-Unies, les termes de référence acceptés lors de la Conférence de Madrid et, bien sûr, les engagements déjà souscrits par les deux parties.
LES REPONSES D’ARLETTE LAGUILLER (Par LUCIENNE PLAIN)
1- 2- 3.
Nous sommes pour le droit de vote à toutes les élections
depuis les municipales jusqu’à l’élection présidentielle- de tous
les immigrés vivant et résidant dans ce pays. Cela fait partie des
mesures qu’Arlette Laguiller et Lutte Ouvrière mettent en avant dans
leur programme et dans toutes les occasions possibles : notre
presse, et en particulier notre presse d’entreprise ; les
manifestations ; les meetings ; à la radio et télé quand l’occasion
est donnée. Nous sommes contre toutes les formes de discrimination.
4 .
Nous sommes parfaitement conscient et le rappelons là encore
chaque fois que nous le pouvons que la population de ce pays
aujourd’hui est le fruit de multiples croisements de populations.
Ceux qui sont ici et sont issus de l’immigration ou de pays qui ont
été colonisés et pillés par la France y ont parfaitement leur place,
au même titre que n’importe quelle autre personne.
5 .
L’école est au centre des préoccupations d’Arlette Laguiller et
de sa campagne. C’est vrai que les premières victimes de la baisse
du nombre d’enseignants, d’accompagnants, d’établissements, de
classes, etc., sont les enfants des catégories sociales les plus
défavorisées. Nous militons pour que l’éducation publique nationale,
service public, reçoive tous les moyens réclamés par les
enseignants, les parents d’élèves et les enfants, afin que les
jeunes reçoivent le meilleur enseignement possible. Il faut donner à
l’éducation tous les moyens financiers, matériels, humains
nécessaires pour faire baisser rapidement l’échec scolaire, assurer
une formation. Nous sommes hostiles au fait que les fonds publics
financent de quelque manière que ce soit des écoles
confessionnelles, de quelque confession que ce soit.
6 .
Nous sommes pour la régularisation immédiate de tous les
sans-papiers qui en font la demande.
7 .
Nous sommes contre les contrôles au faciès et contre tous les
contrôles qui ne visent qu’à arrêter des personnes en situation
irrégulière pour les expulser du territoire.
LES REPONSES DE FRANCOIS BAYROU par MARIELLE DE SARNEZ
À l’évidence, ces questions se posent de façon pressante à notre société et vos remarques sont fondées. Nous proposons la mise en place d’un véritable plan contre les discriminations en deux temps :
– organiser un vrai débat public, sous forme de commissions dédiées à plusieurs des sujets que vous abordez ;
– mettre en place un ensemble de bonnes pratiques, comme le curriculum vitae anonyme par exemple, qui facilitera l’accès à un entretien d’embauche.
Pour François Bayrou, la non intégration est un ferment de destruction de notre société. Or, il est urgent d’opérer la refondation de la communauté nationale. Quelle que soit la personne attaquée, musulman, juif, catholique ou autre, un Français et une communauté intégrée du peuple français méritent la même attention et la même émotion, le même bouleversement et la même solidarité.
Comme nous, vous déplorez l’absence de maire ou de député issu de la diversité de l’immigration. Introduire, dans la loi électorale, et au moins pour moitié, la règle proportionnelle permettra une représentation plus fidèle et plus juste des minorités. Nous sommes convaincus de la nécessité de réformer notre mode de scrutin. Il s’agit de garder une partie de scrutin majoritaire et introduire une partie de représentation proportionnelle qui permettrait aux citoyens français, appartenant à un courant de quelque substance que ce soit, d’être certains d’être représentés au Parlement. Ainsi se créerait-t-il un équilibre entre exécutif et législatif, ce dernier ne dépendant plus de l’exécutif. Tous les pays européens, sauf la France et la Grande-Bretagne, ont un système proportionnel.
Aujourd’hui, une fraction de plus en plus significative des Français n’a aucune représentation parlementaire et cela est injuste. Cela conduit à un véritable déficit démocratique qui nous préoccupe. La représentation et la participation des citoyens sont les deux piliers de notre démocratie : il faut les restaurer et les consolider.
En ce qui concerne l’école, creuset de toutes les chances, François Bayrou est convaincu qu’elle doit donner de l’espoir et se révéler un lieu de respect et d’apprentissage serein ; des classes d’excellence doivent se trouver partout et ce, sans abandon de la carte scolaire.
Pour les populations des banlieues, l’Etat est ce qui vient de l’extérieur, en position d’intrusion ou de contrôle. Lorsqu’il intervient pour réprimer, la situation tourne trop souvent à l’affrontement. Il est vital de réimplanter l’Etat au cœur des quartiers pour y incarner la sécurité et le service public. Un véritable Etat de proximité, et pas seulement la police de proximité. Un Etat qui protège et qui aide, et pas seulement un Etat répressif, voilà notre programme. Un Etat respectueux, donc respectable et respecté.
François Bayrou propose une politique nationale d’immigration articulée en deux volets : la maîtrise de l’immigration clandestine d’une part et une main tendue à ceux qui peuvent et veulent s’intégrer d’autre part.
La maîtrise de l’immigration clandestine doit se faire en métropole et peut-être plus encore en outre-mer. Il faut lutter résolument contre les filières de passeurs et les trafics d’êtres humains. Les immigrés, pour l’immense majorité d’entre eux, n’arrivent pas seuls. Ils paient, pour venir, très cher.
Il faut en même temps très durement réprimer le travail clandestin. Les immigrés clandestins ne restent que s’ils peuvent travailler : le travail clandestin est la condition de l’immigration clandestine. Chacun sait qu’il est en réalité peu réprimé.
La politique d’immigration doit être une politique européenne de circulation, de visas et d’accompagnement des immigrés. Si un immigré n’est pas admis, il doit être reconduit le plus vite possible. S’il est admis, il faut l’inciter à s’intégrer à la société française, par un programme d’intégration portant sur la langue française et nos valeurs. L’assiduité à un tel programme serait une condition de régularisation. Les immigrés arrivés clandestinement sur notre territoire ne sauraient être régularisés que sur des critères clairement définis : contrat de travail, maîtrise de notre langue et de nos valeurs, connaissance de notre mode de vie. Autrement dit, au cas par cas, après étude sérieuse.
Enfin, afin de remettre de la démocratie dans notre République, nous sommes favorables au vote des étrangers aux élections locales : comment justifier qu’une personne résidant depuis 10 ans en France, acteur de la vie locale, ne puisse exprimer ses choix dans la vie de la cité ? Soyez assuré que François Bayrou est très attaché au respect du principe d’équité entre les Français.
LES REPONSES DE DOMINIQUE VOYNET
1.
Par leur ampleur, leur institutionnalisation, leur impunité, les discriminations ont des conséquences très graves et constituent un danger pour la démocratie ; elles minent notre République, qui ne peut répondre à ces défis urgents en se réfugiant derrière l’universalisme abstrait d’un modèle totalement virtuel.
Les discriminations ne sont pas le fait uniquement d’individus ; elles font en fait aujourd’hui système. Elles sont caractéristiques d’un fonctionnement général de notre société. Les Verts refusent cet état de fait, ils sont profondément attachés à l’égalité effective et à la diversité – des langues, des minorités, des modes de vie, des cultures.
Refuser les discriminations, c’est vouloir réformer radicalement notre système politique et social. Il faut rendre efficaces les outils existants et changer les pratiques sociales. Il existe des outils juridiques en matière de lutte contre les discriminations. Cependant, la plupart des plaintes sont aujourd’hui déqualifiées ou classées sans suite. Les Verts veulent la mise en place d’une évaluation des outils existants et une analyse des dysfonctionnements pour adapter en temps réel notre système législatif et administratif.
Il est indispensable de doter la Halde d’un véritable budget à la hauteur des enjeux et de lui assigner une mission d’intervention contre les discriminations en permettant qu’elle puisse s’auto-saisir.
Je crois qu’il faut mettre en actes une politique visant à promouvoir activement la diversité. Quel que soit le terme employé, il est question d’imaginer des dispositifs qui permettent de mettre fin à l’absence de diversité dans trop d’instances politiques, économiques et sociales. La nature de ces dispositifs doit faire l’objet d’un grand débat national.
2.
Les Verts sont favorables au droit de vote et d’éligibilité des résidents étrangers pour toutes les élections. Je suis favorable à cette mesure une fois cinq ans de résidence accomplis. Cette réforme doit être menée à bien aussi vite que possible. En cas de victoire de la gauche, la nouvelle majorité doit fixer un calendrier et faire le choix de la méthode : voie législative ou voie référendaire.
Il faut rappeler que le 3 mai 2000, une proposition de loi constitutionnelle a été approuvée par l’Assemblée Nationale et transmis au Sénat. Cette proposition de loi qui donne le droit de vote et d’éligibilité aux résidents étrangers communautaires n’a jamais été mise à l’ordre du jour du Sénat.
En fait, nous sommes pour la mise en place d’une citoyenneté européenne de résidence.
3.
Si les discriminations prennent une telle ampleur dans le schéma français c’est parce qu’elles ne sont pas le fait d’un ou de plusieurs individus, mais celui d’un système qui les organise et les généralise. Elles sont caractéristiques du fonctionnement général de notre société et d’une certaine conception de la démocratie. Il faut aussi agir en amont et, je le répète, mettre en actes une politique visant à promouvoir activement la diversité. Quel que soit le terme employé, il est question d’imaginer des dispositifs qui permettent de mettre fin à l’absence de diversité dans trop d’instances politiques, économiques et sociales. La nature de ces dispositifs doit faire l’objet d’un grand débat national.
Les révoltes de novembre 2005 nous interpellent, nous forcent à questionner les échecs des politiques publiques et nos propres limites. Les causes profondes de tels événements sont à chercher dans une situation sociale détériorée, dans les échecs répétés des politiques de la ville, de l’emploi, de l’éducation, du logement, de l’égalité des droits, des transports, de la qualité de l’environnement, etc. Nous sommes, dans ces quartiers, encore plus qu’ailleurs, confrontés à des urgences sociales, environnementales et démocratiques. Il ne s’agit pas uniquement d’urbanisme.
C’est donc toutes les politiques publiques qu’il faut revoir : relocaliser l’économie, maîtriser les coûts du logement, offrir des alternatives avec une ville plus accueillante, des réseaux de transports en commun plus efficaces que l’automobile.
Du point de vue de l’écologiste que je suis, il faut améliorer les transports publics collectifs afin que des habitant-e-s de banlieue sorte d’une quasi-assignation à résidence, puisqu’ils n’ont pas toujours les moyens d’acquérir un véhicule. La discrimination sociale se double ici d’une ségrégation territoriale. Il faut développer les transports inter-banlieues et accroître leur offre, en particulier par une fréquence plus élevée et plus tard en soirée.
La lutte contre les discriminations dans le logement doit s’accompagner de la création d’un corps d’inspecteurs du logement formés et disposant des moyens humains et matériels suffisants pour effectuer des contrôles dans tous les domaines concernant le logement. Afin de lutter contre les discriminations dans l’attribution des logements sociaux, il convient de ne conserver que les données nécessaires pour répondre aux critères d’attribution des logements sociaux, afin que les procédures soient anonymes, et de rendre obligatoire la motivation détaillée des refus des demandes de logement, tant dans le secteur privé que public.
Pour lutter contre les discriminations à l’embauche, qui écartent trop souvent des emplois les personnes d’origine étrangère quelles que soient leur qualification, je veux rendre possible le recours à la loi pour celles et ceux qui sont en victimes, en aménageant, comme cela est possible dans le droit du travail, la charge de la preuve en matière civile et commerciale pour les personnes physiques et morales. S’il est alors prouvé une différence de traitement manifeste, il reviendra à la personne incriminée d’apporter la preuve qu’il ne s’agit pas de discrimination mais d’un traitement objectif.
4.
S’il ne convient pas aux femmes et aux hommes politiques d’écrire l’histoire, il me semble nécessaire que les programmes scolaires intègrent davantage l’étude de ce que fut la colonisation, la traite ou les guerres coloniales.
Je pense également que la célébration de l’abolition de l’esclavage doit faire l’objet d’une mobilisation réelle des institutions de notre République.
Enfin, il me paraît indispensable d’instaurer une commission d’historiens permettant de faire la lumlière sur les crimes de la Françafrique durant la décolonisation et la période post coloniale assassinats de Lumumba, Sankara, Olympio, massacres des militants de l’UPC au Cameroun….).
5.
Pour résoudre la question de l’échec en ZEP, c’est toute la politique de l’inégalité scolaire qu’il faut repenser si l’on veut offrir de quoi réussir dans ces lieux :
– attribution de plus de moyens (dans les bilans des ZEP, il faut remarquer qu’elles ont reçu à peine plus que les écoles -collèges non ZEP- et encore si on compte les salaires, les profs étant plus anciens dans les lieux hors ZEP, donc mieux payés, l’avantage s’inverse !) ;
– et surtout revoir le fonctionnement de l’école obligatoire, collège, école primaire, leurs missions, l’apprentissage des fondamentaux (on sait que 20 % de élèves passent en 6ème sans avoir les acquis), sans doute par un changement dans les méthodes d’enseignement et les contenus au collège.
En l’état, le système actuel de la carte scolaire n’est pas seulement imparfait, il est hypocrite ; il défend ce qu’il ne fait pas. Je suis contre le système des dérogations réservé à quelques-uns, qui est un des outils de « l’évitement de la mixité sociale ». On peut toujours chercher des solutions techniques ou administratives, tant qu’il y aura des écoles dans lesquelles le niveau national n’est plus de fait la référence à atteindre, alors les familles les plus aisées fuiront ces écoles. Il faut donc retrouver un niveau satisfaisant dans toutes les écoles de ce pays en distribuant inégalement les moyens scolaires sur le territoire, en donnant plus à ceux qui ont moins (les ZEP ont reçu – hors salaires enseignants – à peine plus). La carte scolaire redeviendra alors ce quelle devrait être, une simple technique de gestion. Je veux la renforcer pour assurer une réelle mixité sociale en l’étendant au secteur privé.
Je défend la Laïcité (liberté individuelle de croire ou de ne pas croire) et je ne veux pas réveiller de guerre scolaire, il ne me semble pas possible de revenir sur le financement « sous contrat » des écoles privées. Ce que je chercherais à appliquer, après discussion avec les associations laïques, est l’idée d’intégrer les écoles privées, souvent confessionnelles, dans la carte scolaire, et de les contraindre, sous peine de perdre le financement public lié au « contrat », à accepter, sans sélection, les enfants habitant dans le périmètre de leur ressort : comme leurs capacités d’accueil sont limitées, lorsqu’elles seront atteintes, les autres enfants devront aller dans l’enseignement public !
6.
Nous sommes pour la régularisation de tous les sans-papiers et la mise en place d’une autre politique de l’immigration tendant vers la liberté de circulation et d’établissement. La France a une politique de l’immigration très restrictive, alors qu’elle devra sans doute rouvrir ses frontières pour faire face au « papy boom ». Il y a un mythe de l’invasion qu’il faut combattre. Alors que la liberté de circulation était plus facile dans les années 70 entre notre pays et l’Afrique, aucun afflux massif ne s’est produit au moment de la grande sécheresse sahélienne. Il faut faciliter la délivrance de visas long séjour à entrées multiples pour permettre tant la venue que les retours des étrangers.
Il faut permettre aux retraités étrangers ayant travaillé en France de percevoir leur retraite dans leur pays plutôt que de les obliger à rester en France.
Il faut dépénaliser le séjour irrégulier. Il faut lutter contre le travail clandestin, les filières d’immigration et toutes les formes d’exploitation des étrangers. Il faut faire respecter le droit de vivre en famille, en particulier en finir avec les situations scandaleuses que condamnent régulièrement le Réseau Éducation Sans Frontières.
Par ailleurs, il faut mettre en place la possibilité d' »allers-retours » pour les migrants et des accords contractuels entre l’Union européenne et les pays du sud pour éviter le « pillage » des pays du sud. Pour nous, ces deux questions sont liées et c’est pour cela que nous demandons le transfert des politiques d’immigration du ministère de l’intérieur vers un ministère de la coopération solidaire. Nous devons construire des partenariats où tout le monde est gagnant. La France a tiré profit de ses anciennes colonies. Il est normal aujourd’hui qu’elle aide ces pays en modifiant sa politique étrangère en direction des citoyens et non de gouvernements, souvent arrivés au pouvoir par des coups d’état. Et si la politique de l’immigration française devait se limiter à donner des visas à des étrangers hautement qualifiés, cela serait une forme de néo-colonialisme.
7.
Derrière le mot d’ordre de lutte contre le terrorisme c’est bien à une grave remise en cause des libertés publiques et de respect des différences à laquelle nous assistons depuis plusieurs années. Les violences policières se développent, les contrôles au faciès se multiplient, provoquant l’exaspération de tous ceux qui n’ont pas la « bonne » couleur de peau.
Il faut éviter les amalgames, ne pas stigmatiser les jeunes, ne pas participer à la surenchère sécuritaire à laquelle se livre une partie de la classe politique depuis de longues années, avec pour seul résultat tangible la légitimation des idées xénophobes et racistes.
Les forces de l’ordre doivent lutter contre toutes les formes de discriminations. Ce qui suppose leur sensibilisation, non seulement au moment de leur formation, mais également tout le long de leur carrière. La police, comme tout pouvoir, nécessite des contre-pouvoirs capables de limiter ses abus. Or, l’Inspection générale de services (IGPN) semble insuffisante à limiter les dérives. La création d’un corps de citoyens, composé d’élus, de magistrats, de militants associatifs, sous l’autorité de la CNDS – Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité -, autorisés à être physiquement présents auprès des forces de l’ordre en action (sur le terrain ou dans les commissariats) permettrait un contrôle indépendant et régulier des pratiques policières. Mais le point le plus important reste la CNDS qui ne dispose pas de moyens financiers et humains suffisants : il faut donc augmenter son budget pour élargir aussi ses missions. La saisine de cette instance doit être directe et ne plus passer par un parlementaire.
La police doit redevenir un véritable service public. Avec tous les problèmes que les citoyens rencontrent avec certains fonctionnaires et certains commissariats, il faut mettre en place un service de médiation pour améliorer durablement la qualité de vie dans certains quartiers, tout comme les conditions de travail de la majorité des policiers : ce serait peut-être le rôle de la CNDS si on augmente ses moyens.
Je veux aussi créer une véritable police nationale de proximité, qui permette d’instaurer des liens durables avec la population d’un territoire, condition d’un meilleur respect mutuel, supprimer la police municipale et réaffecter le budget dégagé à la médiation et la prévention.
De nombreuses lois comportant des dispositifs liberticides ont été adoptées depuis 2001. La loi dite « sécurité intérieure » (18 mars 2003) et la loi de « lutte contre le terrorisme » (21 mars 2006) doivent tout particulièrement être abrogées, mais c’est également le cas des lois sur la « prévention de la délinquance » et sur la « sécurité quotidienne ». La lutte contre le terrorisme n’a aucune raison de s’opposer aux respects des libertés, et d’utiliser les mêmes méthodes que le terrorisme : s’attaquer aux conditions favorables à la propagation du terrorisme ne peut pas signifier s’attaquer aux droits fondamentaux, car cela revient alors à renforcer le terrorisme.
Il faut limiter drastiquement les contrôles d’identité. Une grande partie des troubles dans les quartiers populaires naissent des dérapages et des fréquences des contrôles d’identité, qui deviennent des contrôles au faciès. Ce qui impose de modifier dans ce sens la loi sur les contrôles et vérifications d’identité du 3 septembre 1986 et celle qui pénalise les rassemblements dans les halls d’immeubles.
Enfin, je crois que le respect de la présomption d’innocence s’impose à tous, et aux media en particulier. Il est temps que tout le monde bénéficie des mêmes garanties et du même respect.
8.
Il faut en finir avec la Françafrique. Les relations entre l’ancienne puissance coloniale et les de nombreux pays d’Afrique sont encore aujourd’hui marquées par le colonialisme. Corruption et clientélisme fondent des relations d’un autre temps.
Je veux instaurer un contrôle démocratique des banques et de leurs filiales de gestion d’actifs financiers, qui sont les véritables opérateurs de la finance internationale et gèrent l’épargne de millions de salariés.
La France prendra l’initiative d’une conférence internationale ouvrant la négociation d’un cadre international juridiquement contraignant de responsabilité des entreprises, qui reconnaisse le devoir de responsabilité sociale, sanitaire et environnementale des acteurs économiques et, en cas de manquement, la possibilité de sanctionner les acteurs défaillants.
Par ailleurs, nous constatons que loin de résoudre les problèmes de nombreux pays, la mondialisation libérale des échanges de marchandises accroît sans cesse le fossé Nord/Sud. Mon projet est basé sur la liaison indissociable entre coopération solidaire, immigration et commerce international pour bâtir une planète équitable, humaine et pacifiée.
Je veux établir une taxation des mouvements internationaux de capitaux,« taxe Tobin », à l’échelle européenne. Largement portée par les représentants des pays du Sud, cette proposition de taxe sur les flux du capital, hautement symbolique, est une des demandes fortes dans une dynamique de solidarité avec les peuples du Sud.
Plus largement, je veux proposer une réforme de l’Organisation mondiale du commerce pour soumettre ses normes et ses règles commerciales aux normes sociales, environnementales, sanitaires et culturelles de l’OIT, de l’OMS et de l’UNESCO.
Je propose également que la France œuvre pour que le FMI et la Banque Mondiale soient transformés en agences de l’ONU.
De plus, la politique agricole mondiale mise en place par l’OMC est un désastre aussi bien pour les peuples, que pour les paysans et l’environnement. Elle est inégalitaire avec les subventions publiques à l’exportation, accessibles aux seuls pays riches. Elle ruine et affame les pays du Sud qui ne peuvent aider financièrement leurs paysans comme le font les pays riches. Ces subventions constituent un véritable dumping, ainsi que vient de le juger l’ORD pour les aides au coton des USA. C’est pourquoi cette politique agricole doit être profondément transformée. Il faut reconnaître le droit inaliénable à la souveraineté alimentaire par groupes de pays homogènes.
Enfin, il est également nécessaire de refonder la politique d’aide publique au développement en instaurant une loi d’orientation et de programmation pour la coopération solidaire, qui permettra d’atteindre l’objectif de 0,7 % tout en concentrant l’aide sur les pays les plus pauvres et sur les besoins fondamentaux : l’accès à la santé, à l’éducation, à l’eau et les énergies renouvelables. Et au préalable, d’annuler la dette de manière unilatérale, immédiate et complète pour les pays où elle est insupportable et en gelant les avoirs des dirigeants corrompus.
Dans le conflit israëlo-palestinien, la France doit faire preuve de fermeté pour affirmer une diplomatie qui œuvre dans le respect du droit international. Je veux qu’elle use de son siège de membre permanent pour demander la convocation d’une conférence régionale, sous l’égide des Nations Unies le plus rapidement possible, afin de relancer le processus de paix par le dialogue multilatéral dans la région et de réclamer le respect de l’ensemble des résolutions pour la création d’un Etat palestinien. Au sein du Conseil de Sécurité, il faut que la France exige le respect des résolutions existantes et des frontières de 1967.
Par ailleurs, je condamne l’action militaire comme mode de règlement des conflits. J’agirais pour une diminution du poids des armes et du nucléaire dans la région. Il est indispensable d’avancer non seulement vers le désarmement nucléaire de l’Iran, mais également vers une dénucléarisation de toute la région (Israël compris).
Le rétablissement de l’aide financière européenne à l’autorité palestinienne est indispensable : sa suspension m’apparaît comme une punition collective et semble entériner la non reconnaissance des résultats d’une élection reconnue par l’Europe comme démocratique. L’Union européenne doit contribuer à la réparation des infrastructures nécessaires aux besoins de base de la population et à la libération des prisonniers politiques, des élus et des membres du gouvernement détenus par Israël. La voie de la paix juste et durable est la seule possible pour assurer le droit à la sécurité pour tous les peuples de la région.