Peut-on tout dire pour gagner une élection présidentielle dans un système républicain et démocratique ?
Donné battu dans les sondages, Nicolas Sarkozy tente « le tout pour le tout » pour mettre à terre François Hollande et briguer un deuxième mandat présidentiel. Le candidat de la droite drague outrageusement l’électorat du Front national. Ce dernier a fait 18 % (six millions et demi de voix) lors du premier tour de l’élection présidentielle. L’électorat de la France qui souffre, disent certains, est courtisé, en cette campagne du deuxième tour, à la fois par le Parti socialiste et par l’UMP.
Mais de quoi souffre-t-il cet électeur du Front national ? Souffre-t-il de l’ouverture de la société française, de la consécration du principe d’égalité avec des mesures concrètes, de la lutte contre les discriminations, de la promotion de la diversité et du multiculturalisme ? A-t-il du mal à accepter que le Français puisse être autre chose qu’une « apparence » « européenne, blanche ou catholique » ? Est-ce cela la France qui souffre ? Le raciste, de quoi souffre-t-il ?
Au lendemain du premier tour, le discours de Nicolas Sarkozy a, encore une fois, étonné, voire effrayé bon nombre de personnalités politiques. Il commence en badinant avec les symboles de l’histoire, en utilisant, par exemple, l’expression de « vrai travail ». Il invente ou s’aligne sur des concepts conçus par le parti de l’extrême droite, telle « la présomption de la légitime de défense » en faveur des fonctionnaires de la police nationale à la suite de la mise en examen pour homicide volontaire du policier qui a tué, le week-end dernier, à Noisy-le-Sec (Seine-Saint-Denis), un multirécidiviste en fuite. Il propose de légiférer sur des événements ou des situations qui relèvent des faits divers. Aurait-il proposé cette « présomption de la légitime de défense » si ce « caïd » tué par le policier avait été d’une autre couleur ?
Peut-on sérieusement dire que le style de Nicolas Sarkozy et du sarkozysme a vraiment changé quand il a contribué et a continué à banaliser le rejet de l’autre et le racisme.
Ses déclarations idéologiques et politiques sont, en effet, cohérentes avec les thèmes et les événements choquants qui ont marqué son quinquennat. Entre autres : le discours de Dakar et de Grenoble, le débat sur l’identité nationale, la condamnation en première instance de son ancien ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, pour injure raciste. Ce qui fut une première dans les annales politiques et judiciaires : jamais un ministre en exercice ne s’était fait condamner par un juge correctionnel. Ajoutons la cascade de propos de Claude Guéant qui stigmatisaient les groupes de personnes au motif de la nationalité, de l’origine et de la religion (Comoriens, Roumains, musulmans…) et ses affirmations qui ont suscité de vives polémiques sur les civilisations, et les déclarations de Nadine Morano sur le « jeune musulman » lors du débat sur l’identité nationale… Sans oublier, bien entendu, la polémique sur les fonctionnaires et l’obligation du service social qui devrait être imposée aux bénéficiaires du RSA.
Le bilan politique du président sortant est donc plus que catastrophique car le candidat Nicolas Sarkozy a divisé et a contribué à renforcer les inégalités et les injustices sociales.
C’est pourquoi, Monsieur le président candidat sortant, Nicolas Sarkozy, je vous implore, mettez de la décence et de la retenue dans vos propos et vos positions politiques pour bien finir enfin votre quinquennat !
Par Fayçal Megherbi, juriste.