L’intelligence comme la religion ont un même rôle

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Manuel Valls rêve de revenir aux affaires lui qui est aujourd’hui perdu dans le marigot des non-inscrits au parlement, peu d’amis, plus de parti …
Rien de tel que le parfum du scandale et de la polémique qui n’a d’égal que celui de la poudre pour revenir en scène.
Comme Jean Marie Le Pen qui jadis agitait la menace des émigrés, Valls s’est emparé de l’islam pour tenter de faire du bruit et de rappeler son existence. Et le voilà soudain transformé en grand avocat de Charlie Hebdo contre Edwy Plenel qu’il accuse même d’avoir lancé un appel au meurtre contre lui. Il voudrait que les « islamo-gauchistes » et une certaine gauche rendent gorge. Voici donc un beau programme ! Ou ne s’agit-il que de rebondir à l’occasion d’une polémique sur laquelle on peut prospérer faute d’avoir trouvé un autre moyen de faire oublier qu’il fut ministre de l’Intérieur et des Cultes, puis premier ministre. Sa seule production comme solution aux problématiques réelles de l’Islam en France, fut la bien silencieuse et inopérante Fondation de l’Islam de France dirigée par le respectable, mais sans doute peu adapté à l’enjeu, Chevènement et née dans une improvisation absolue.

Certes la une polémique de Charlie Hebdo sur le non moins polémique Tarik Ramadan ne méritait pas un tel émoi de ceux qui en croyant défendre l’islamologue en passe de déchéance et une religion en rien menacée par des galéjades, ont permis de rallumer cet éternel débat toujours aussi mal conduit sur l’Islam. De nouveau les intellectuels islamo sceptiques ou islamo-hostiles s’écharpent avec ceux qui tentent de ramener un peu de nuance ou d’honnêteté intellectuelle. Les démonstrations qui se veulent toutes les plus absolues sur la solubilité ou l’insolubilité de cette religion dans la République sont étalées dans les média, volent les noms d’oiseaux et désormais les accusations d’appel au meurtre. Même Zemmour et Finkielkraut bien silencieux jusque-là semblent lassés.
Et surtout encore une fois, on parle à la place des musulmans, on leur explique ce qu’ils devraient dire, les preuves de leur innocuité que l’on attend d’eux. Ces éternels mineurs privés de micro, de tribune, Ces presque encore sujets encore à qui on n’offre rien que la fumeuse fondation de l’Islam de France, le CFCM totalement inadapté au rôle qu’il devrait pourtant tenir, ou parfois quelques trop rares espaces dans la presse et les media.
L’intelligence comme la religion ont un même rôle, relier, et c’est ce qui manque principalement dans ce débat qui commence à s’éculer sans pour autant fournir de lignes claires et de progrès dans la recherche d’une voie apaisée et constructive.

Il n’y a à ce jour personne, ni aucun endroit où les hommes de bonne volonté quel que soit leur confession ou non confession, les intellectuels ou « élites » musulmanes puissent trouver un moyen de s’écouter de se parler, de s’expliquer. Il n’y a à ce jour rien qui sache s’adresser à cette jeunesse qui, issue des quartiers populaires, a remplacé les blousons noirs d’antan dans l’imagier commode de l’effroi. Pourtant, cette génération est peut- être la dernière qui a grandi avec un idéal de non communautarisme, la prochaine s’en accommodera très bien.
La manière dont on utilise la laïcité fait qu’elle perçue à ceux dont on veut expliquer les vertus comme si c’était le fléau de Charles Martel. Elle est surtout prise en otage et réduite à un vulgaire instrument de campagnes électorales ou d’agent lustrant pour des carrières politiques ternies.
On se sert de l’Islam soit comme d’un repoussoir, en profitant pour nier la main sur le cœur que puisse exister une islamophobie, soit comme un instrument de prise de contrôle d’esprits faibles sans repère ni identité solide dans une République incapable de regarder en face ces échecs. Mais aussi, et c’est tout aussi grave pour justifier des comportements arriérés, un sexisme que ne comprendrait sans doute pas le prophète, lui qui avait épousé en premières noces une femme commerçante plus âgée que lui et dont la descendance ne fut que féminine. L’émergence d’une religion qui se résument à l’obéissance à des prescriptions qui isole et les contraint, privent une partie des musulmans de se consacrer à la spiritualité plutôt qu’a la forme. Pire encore, les empêchent surtout d’avoir une démarche critique sur ce qu’ils sont devenus. Eux dont l’histoire témoignent de ce que fut leur contribution au progrès de l’humanité. Eux qui aujourd’hui trop souvent se contentent de débattre de la taille d’une barbe, du hallal ou haram, plutôt que de préférer « l’encre des savants au sang des martyrs » comme les y invitait le prophète Mahomet ou encore d’«aller chercher le savoir jusqu’en Chine car le savoir est une obligation pour tout musulman » pour continuer de le citer.

Faudrait-il que le changement vienne de cette Arabie Saoudite dont le venin wahhabite a corrompu l’islam serein et apaisé de nos pères ? Serait ce jeune prince qui donnera le signal, lui qui déclarait il y a peu :
-« Nous voulons vivre une vie normale. Une vie où notre religion signifie tolérance et bonté »
-« 70% de la population saoudienne a moins de 30 ans et, franchement, nous n’allons pas passer 30 ans de plus de notre vie à nous accommoder d’idées extrémistes et nous allons les détruire maintenant et tout de suite »,
Est-ce que les propos du président Macron, assez peu commenté ne devrait pas mériter plus d’attention sur ce qu’on a pu lui dire lui qui salue « son discours sur l’ouverture de son pays et l’appui à un islam modéré. »
Cette révolution serait -elle en marche ? Et nous en France, serions-nous coincés sur des débats d’arrière- garde et la préservation d’un discours convenu sur un islam irréformable garant d’une rente politique assurée, alors qu’ailleurs se joue déjà le coup d’après ?
Ce ne serait pas digne de notre pays et sans doute la marque d’une appartenance « au vieux monde ». Pourtant, ici existe un écosystème particulier ou l’esprit des Lumières doit pouvoir aider à faire renaitre celui de l’Andalousie, seul moyen pour les musulmans de guérir de leur syndrome obsidional obsessionnel.

Cessons ces polémiques stériles et stérilisantes, scories qui plombent éternellement les vraies questions : comment sortir le monde musulman de sa gangue, comment offrir à notre jeunesse l’espoir d’une vie meilleure ici dans leur pays et pas dans l’au-delà. Soyons capables d’être, musulmans et aussi non musulmans les acteurs d’une perestroïka de l’Islam tant attendu de ceux, qui en véritables bons croyants, veulent le meilleur pour leur foi, l’éclat que ne procure pas l’opprobre de la barbarie et de l’ignorance. C’est le rôle des musulmans de France, de nos intellectuels, de notre diplomatie et aussi de nos politiques. Certains devraient s’en souvenir.

Madjid Si Hocine

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