Strasbourg collectionne les actes racistes (AFP)

La multiplication des actes racistes et antisémites à Strasbourg depuis le début de l’année témoigne d’un « climat délétère » en France, s’alarment la municipalité et les responsables religieux, qui redoutent une escalade.
Profanations de cimetières, agression antisémite en pleine rue, tags
néonazis au domicile de responsables musulmans et d’un médecin juif: nul ne sait expliquer l’explosion de ces actes de haine et d’intolérance, au nombre de 13 depuis janvier.
Pour Janine Elkouby, du Consistoire israélite du Bas-Rhin, « ce qui est
inquiétant, c’est l’évolution de ces actes: on s’en prend aux cimetières, puis aux personnes en visant leurs biens ou leur domicile ».
« Il est temps que les pouvoirs publics prennent au sérieux cette escalade », qui pourrait mener à des violences contre les personnes, ajoute Mme Elkouby.
Une agression physique a déjà eu lieu en avril. Un homme portant la kippa a été frappé à coups de barre de fer et de couteau en plein centre-ville. Mais l’auteur des faits a été présenté par la justice comme un « déséquilibré ».
Pour le reste, le maire évoque « des actes qui sont peut-être, sinon
organisés, du moins pensés ».
Le mois dernier, une agression nocturne au domicile d’un intellectuel
franco-turc, a failli tourner au drame: « J’ai été sauvé par l’intervention de
mes voisins alors que deux personnes s’étaient introduites dans mon jardin et ont incendié mes deux voitures. Les flammes touchaient presque les fenêtres », a raconté la victime, Faruk Günaltay, dont la maison a été taguée d’inscriptions néonazies.
Le week-end dernier, des inscriptions similaires ont été retrouvées au
domicile d’un médecin juif de renom, le gynécologue Israël Nisand.
Des agressions qui surviennent après quatre profanations de cimetières (deux juifs et deux musulmans), des tags « anti-minarets » au domicile du maire, et d’autres sur la voiture d’un responsable du projet de grande mosquée à Strasbourg.
La justice n’a annoncé aucune avancée significative dans l’enquête sur ces agressions. Impossible, donc, de savoir qui se cache derrière ces actes, ni s’il s’agit d’un même individu ou d’un même groupe structuré.
A défaut de désigner des auteurs, le maire, les responsables religieux et des intellectuels dénoncent un « climat délétère ».
Le maire PS de Strasbourg, Roland Ries, a pointé clairement du doigt la
mouvance d’extrême droite en lançant lundi un appel à « un front républicain de refus de l’inacceptable ».
« Le climat politique est problématique à Strasbourg, et plus globalement en France et même en Europe », a relevé M. Ries, évoquant « la résurgence des partis d’extrême droite dans certains pays d’Europe ».
« Avec l’affaire des Roms, on a justifié la stigmatisation d’un groupe en
tant que tel », analyse Mme Elkouby. « Tout cela contribue à un climat qui
facilite de tels actes ».
Pour le politologue strasbourgeois Richard Kleinschmager, « on a
l’impression que les freins sont libérés, qu’on peut stigmatiser l’étranger,
le juif, et se livrer à des attaques personnelles ». Et cela alors que
« l’Alsace est une région où la sensibilité d’extrême droite est déjà
traditionnellement forte ».
Dernier exemple en date de cette absence de freins: un homme de 30 ans, domicilié en banlieue de Strasbourg, a été placé en garde à vue pour avoir mis sur internet une vidéo où il brûle une édition du Coran puis urine sur les cendres « au nom de la liberté ». Il devrait être poursuivi pour « incitation à la haine raciale ».

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